C’est un voilier de 6 ans, le 387108/2012 qui empoche le titre d’Optimus Fortis Assen 2018, comprenez « As Assen sur les 4 dernières années » : 2015-2016-2017-2018. Patrick Guiton, en est l’heureux propriétaire. Je dis « heureux » car des oiseaux comme ceci, sont des oiseaux rares, et très peu sont à même de conserver une telle constance.


Optimus Fortis, As 4 années

Qu’il est long et difficile le chemin qui jalonne 4 années de prix successifs. Il s’agit de faire 4 années de suite son prix sur la course. Dis comme ceci depuis son fauteuil, pas de soucis, mais dans la réalité, nous nous apercevons que finalement très peu de voiliers sont à même de réaliser de telles choses à ces distances. Il en existe en effet des aléas : il faut déjà tenir le coup sur 4 années de courses, enfin plutôt 5 ou 6 car en débutant en yearling, les choses ne sont pas si simples non plus, et commencer à deux ans ces courses n’est sûrement pas une grosse erreur. Quand on jette un œil sur les milliers de pigeons participants aux internationaux et finalement le nombre de ceux présents avec 4 prix sur la même étape, on prend un peu plus conscience de ce que peut représenter une telle prestation. Il s’agit là d’oiseaux rares sans l’ombre d’un doute. Il faut bien aussi se mettre en tête que les éditions d’Assen, ne se gagnent pas à 1400 mpm. Il faut, à chaque fois, savoir appuyer dur sur les rames pour gagner sa place. Ces titres-là se gagnent donc durement et les pigeons lauréats de ce type de classement méritent un véritable respect pour ce qu’ils ont su nous montrer.

patrick colombier


387108/2012, le ‘Coucou’

En voilà un qui vaut le détour : en 2018, il cumule les titres d’As 4 et 3 années sur Assen, de 6ème As sur les deux dernières années ainsi que le 5ème As pigeons Assen-Osnabrück.

Pour arriver à de tels titres, il a commencé par une 32ème place sur Assen 2015 ; Assen 2016, il passe près du podium avec une 4ème place ; l’année suivante en 2017, il boucle à la 57ème place du classement, et cette année 2018, il se hisse à la 18ème place en arrivant à 12h04 pour 806 km. Sur Osnabrück 2018 (852 km), il se classe 33ème.

L’an passé, il était déjà bien présent dans les tableaux : 2ème As pigeon Assen sur 2 ans (16-17) ; 4ème As pigeons Assen sur 3 années ; 8ème As pigeon ‘Assen-Osnabrück’ 2017.

Il n’avait pourtant pas trop montré ses talents en yearling, mais avait sauvé tout de même sa tête. C’est à deux ans révolus, pendant les vacances de Patrick, que son fils, resté soigner les voiliers, l’a prévenu que le ‘108’ avait pointé le bout de son bec de bonne heure en ouvrant le bal au colombier. Comme pour un chien de chasse, il était alors ‘déclaré’, les choses étaient parties et l’avenir allait être plus éclairé pour lui.

Des comme ça, on a moins de regrets à payer le sac de grain pour les nourrir au prix où ils sont. Ça fixe aussi une barre sur ce qui est possible et ce qu’on peut attendre d’un voilier. Celui-ci ne mange pas plus de grain dans le colombier que ceux qui n’en font pas la moitié, et il ne produit pas plus de déchets que vous allez devoir gratter…

Cette sacrée bête a été achetée lors d’une vente UCML, pour une petite somme. Il s’agissait d’un bon jeune par Mr Jocou, qui déménageait dans le sud de la France. Le père fut, à priori, un très bon voyageur, acheté chez Gérard Ledoux et fils, lignée Bostyn. La mère serait issue de la colonie de Mr Zak, colombophile dans l’Oise. Le pédigrée n’est donc pas le plus important ici, car très peu de pigeons aux ancêtres connus sur 5 ou 10 générations de noms ronflants n’ont pas un gramme de la valeur de ce 108/12 dont les parents ne sont que vaguement référencés ici.

Patrick n’aime pas garder de pigeons enfermés, les introductions sont donc lâchées et doivent faire leurs preuves. Ça fait parfois un peu mal de voir un billet de 150-200 € ne pas revenir au colombier, mais ceci a l’avantage de ne pas encombrer le colombier de pigeons de papiers (pédigrées). Quelques bonnes surprises sont aussi possibles. Cette année par exemple, le premier tombé d’Assen chez Patrick, qui arrive à la 14ème place du classement marathon, est le 50544/15, pigeon offert par Herman Smulders, qui a été adduit.

Cette année, en pigeon ‘mûr’, le ‘Coucou’ n’a débuté sa saison qu’en juin. Patrick aime bien en effet ménager ses voiliers de grand fond. Les choses n’ont donc commencé, pour notre star, que le 02 juin, sur un La Ferté (186 km) ; s’en est suivi un Châteaudun (160 km) le 9 juin puis le 30 juin un Andrezel (285 km), pour participer à Osnabrück (852 km) le 03 juillet. Avant d’être lancé sur Assen du 30 juillet, il a été lâché à 60-70 km une fois. Habituellement, les pigeons ont un peu plus de kilomètres, dans les ailes avant de débuter les marathons, sans non plus trop les bousculer, mais ça s’est trouvé comme ça cette année.

pigeon

Pour 2018, le ‘Coucou’ a été joué au naturel, alors qu’il était veuf l’an passé. Le but était en parallèle de la saison de jeu d’en tirer quelques œufs, car les copains avait reniflé la perle et la descendance du 108 s’est retrouvée très prisée, donc pas facile à garder à la maison. Il a donc pu élever un jeune suite à un accouplement en avril. La nature a été ensuite suivie plus ou moins car l’élevage ne sera ensuite plus d’actualité. Les ‘naturels’, dont le 108 était cette année, sont alors enlogés sur des œufs de 8-10 jours, enlevés au retour pour retrouver une position similaire sur l’étape suivante. L’inconvénient reste l’avancée de la mue, car notre jolie bête est partie cette année avec la troisième primaire tombée.

L’an prochain il pourrait bien rester à la maison, car deux de ses jeunes de 2016 sont en train de se révéler de très bons voiliers capables de truster les places d’honneur du groupement de l’UCML.


Un colombier qui s’affirme

Patrick Guiton s’affirme être comme une valeur sûre de son groupement et de sa région, chose d’autant plus marquée quand sa distance s’allonge. Il est cette année 2ème champion général de l’UCML et rafle la première place en fond. Depuis 5-6 ans, ce type de classement lui est familier, signe tant de la maitrise de la gestion de la colonie que de la qualité croissante des oiseaux qui y sont hébergés.

L’an passé, avec son 401301/11, il était aussi 2ème as pigeon ‘Assen-Osnabrück’, 3ème as pigeon Assen sur 3 années et 14ème As pigeons Assen sur 2 années. Cette année, le 301 n’a pas été de la partie pour cause de douleur à une patte.


Colonie

Comme Patrick réside en zone pavillonnaire, il ne peut s’envahir de trop de pigeons. Pour cette raison, les reproducteurs ne sont pas légion ici, soit… 4 pigeons qui ne courent pas. Il va, maintenant que les résultats sont là, pouvoir garder au fur et à mesure des voiliers qui ont fait leurs preuves et sont arrivés en fin de carrière, soit… jusqu’au bout de ce qu’ils peuvent. En effet, l’âge de la retraite n’a pas fait l’objet ici de convention bien établie et la carrière va se prolonger tant que la mécanique semble bien opérationnelle.

Les pigeons ont droit à deux volées par jour. Une le matin assez tôt, les pigeons étant refermés vers 8 heures au moment du départ pour le travail, et une seconde le soir pendant 1h30 à 2 heures, sans que ne soient utilisés d’artifices pour maintenir les pigeons en l’air. Ils font comme bon leur semble.

Des voyageurs sera ainsi tiré entre 40 et 50 jeunes. Cette année, exceptionnellement, 60 jeunes ont été bagués, mais c’est un peu trop pour les installations. Il élevait avant sur tout ce qui était présent au colombier ; depuis peu, pour son plus grand bien, il a changé de politique et ne prend des jeunes que sur ce qui a fait ses preuves.

La jeune génération n’est pas jouée, par contre les pigeonneaux sont entraînés d’abord uniquement entre collègues d’installations, avant d’être lâchés avec ceux d’une poignée de copains 3 à 4 fois entre 80 et 100 km.

colombier

Les yearlings vont être engagés sur tous les concours yearlings proposés au groupement et fédération, soit jusque 311 km cette année. Les femelles seront testées sur une course de 600 km environ. Ce fut Maaseik cette année, ou malgré une course très compliquée, seule deux ne sont pas rentrées. Le tri se fait en fonction des résultats et des origines.

Les ‘2 ans’ sont ceux engagés sur 3-4 courses allant du demi-fond au fond.

Pour 2018, l’équipe de voyage était forte de 80 sujets à son démarrage. 25 couples environ ont été joués au veuvage total, tandis que le reste du contingent était ligné au naturel (30 pigeons). Notez quand même que les pigeons de grand fond, destinés donc à Osnabrück, puis Assen, ont été joués sur un gros jeune pour ces deux courses, donc n’ont été joués au veuvage total que jusqu’à la fin juin.

La saison de veuvage commence en général suite à un accouplement fin mars-début avril. S’en suit une couvaison de 7 jours avant de passer au veuvage.

En entame de saison, un traitement de 8 jours à l’Alazol® (contre la trichomonose) est donné. 15 jours après c’est un traitement via de l’Adjusol® (antibiotique) qui est dispensé 8 jours durant également. En cours de saison, tous les 15 jours-3 semaines, un rappel contre la trichomonose via l’Alazol®.

Avant une course, les pigeons ont du vinaigre de cidre dans l’eau pendant 2 jours.

Sur le grain, selon la distance, ils auront 2 à 3 jours de graisse de mouton ou d’Oméga Oil® (Herbots®) pour charger les réservoirs.

Au retour, des électrolytes seront ajoutées à l’eau de boisson tandis que le grain sera humecté de graisse de mouton et saupoudré de levure de bière.

Côté nourriture, les choses sont aussi gérées assez simplement : la base du mélange se compose de mélange ‘liégeois’ auquel est ajouté du blé, du maïs et de l’orge. En cours de saison, l’orge compose jusque 30 % du mélange. Cette proportion va se réduire à néant les 2-3 derniers jours, le taux de ‘liégeois’ se verra augmenté, tandis que l’apport en maïs va passer à 30-40 % du mélange et le blé va en représenter, lui, 10 % en cette période. Un mélange ‘énergy’ de chez Versele Laga® va être ajouté dans le même temps. 2-3 cacahouètes seront également données par pigeon.

Vous le voyez, rien de bien sorcier dans la préparation, rien de très coûteux non plus dans la gestion, l’entretien de cette colonie, qui pourtant s’installe tranquillement dans les colonies sur lesquelles il faut compter à la distance.

On en revient toujours au même, il faut des voiliers de qualité, gérés patiemment, avec constance et simplicité. Voilà à nouveau un exemple à prendre pour qui voudrait se faire plaisir avec des voiliers.

Un grand bravo à Patrick Guitton, homme discret et souriant, qui peut se satisfaire d’avoir au sein de ses installations une telle boule de plume. Bonne continuation,


David Chassagne, août 2018