Une arrivée remarquée au MCGC sera, sans nul doute pour 2016, celle de Philippe Haquette qui, avec son 430256/12 s’installe sur le podium du difficile Assen Semi-national 2016. 

C’est après 14h03 de vol, à 21h33’03’’, que son voilier de 4 ans boucle les 791 km qui le séparaient de Assen, bon pour une vitesse de 938,572 mpm, et une 3ème place semi-nationale. Respect.

Pas un inconnu, en pigeon... comme en escalier

Notre ami n’est pas plus un inconnu qu’un novice en colombophilie, il a déjà un passé que peu d’entre nous peuvent présenter : 1er et 3ème français aux Olympiades de Nitra (Slovaquie) en 2013.

Il n’en jette pas pour autant après les murs, et fait son possible en parallèle de ses activités professionnelles prenantes. Il est en effet gérant de la réputée entreprise de fabrique d’escaliers sur mesure ‘Philippe Haquette’. Il fournit aux professionnels de l’escalier sur mesure. Les affaires, malgré le contexte actuel Français, se portent plutôt bien, signe que tant en pigeons qu’en fabrication d’escaliers, notre ami sait y faire.

Trouvez ci-après un lien vers son site pro, ça présente quand même bien : http://www.escaliershaquette.com/
Vous pourrez aussi faire un petit tour sur son blog : http://philippe37.skyrock.com/

Vous verrez que ses voiliers se débrouillent tout aussi bien dans les courses ‘one loft’, bravo !

Bon le demi-fond alors...

Voici un bail que Philippe n’a plus investi sur du pigeon de grand fond. Localisé près de Tours (9ème région), les courses proposées depuis pas mal d’années maintenant plafonnent plutôt en demi-fond/fond, souvent sans dépasser les 550 km. Cette région a pourtant un joli passé grand fond, mais il n’y a pas d’autre choix que de s’adapter aux réalités de l’évolution colombophile dans nos secteurs. En chef d’entreprise responsable et lucide, Philippe, depuis 4 ans, s’est donc adapté à cette évolution, et, au détriment de sa ‘vieille souche’ a orienté ses introductions vers du demi-fond.

La colonie

La majorité des 25 couples de reproducteurs est maintenant composée de Koopman, Casaert (via notre champion national Didier Hoflack notamment), Jung, Derauw-Sablon, etc...

L’équipe de voyageurs est répartie dans 2 colombiers différents :

- un colombier avec 2 compartiments de 16 veufs chacun
- un colombier avec 20 veufs et 20 veuves

Des 70 pigeonneaux élevés, 50 le sont du premier tour, le reste sera tiré sur une seconde voir une troisième tournée.

Les jeunes du premier tour sont joués sur 6 concours jusque +/- 350 km. Le même programme attend les mâles yearlings, alors que ces demoiselles d’un an seront testées sur le programme fédéral.

Tout ce qui reste est conservé pour l’année d’après. Philippe, en bon gestionnaire veut donner une chance à ses jeunes pousses, ne pas abîmer les jeunes mâles plus immatures et longs à se construire, pour pouvoir exploiter leur talent jusque 5-6 ans ensuite.

430256/2012

Ce n’est pas un grand hasard si ce sujet de la colonie Haquette n’est pas issu des introductions demi-fond plus récentes. Pour pouvoir dormir à l’abri dans son casier ce soir-ci en ayant été lâché le matin sur Assen, il fallait avoir l’hérédité faite pour de telles épreuves. Ceci ne suffisait pas, il fallait également être estampillé ‘qualité supérieure’, car bien peu ont pu réaliser une telle prouesse ce jour-là.

Côté origines, il remplit le critère grand fond : son père est un pigeon Hollandais. Signalé à l’éleveur, celui-ci, amateur connu internationalement n’a pas daigné donner suite...

La mère du 256 est issue de la ‘vieille origine’, aujourd’hui moins utilisée. Le courant sanguin de cette femelle est essentiellement constitué de pigeons ‘Imbrecht’, champion Belge dont les pigeons ont fait le bonheur de nombreux amateurs de par le monde.

Ce 256 n’est, comme son patron pas un inconnu : l’an passé, il était 3ème As pigeon en 9ème région sur le programme fédéral. Vous pourrez admirer en parallèle la couleur magnifique de ce voilier de grande qualité, comme quoi les rapaces ne les croquent pas tous. Il lui aura sûrement fallu, malgré tout, une habileté hors norme pour ne pas tomber, avec une telle robe dans les griffes des prédateurs ailés. Le petit plus de classe qui vous sauve la vie !

Cette saison a été une mauvaise année pour la colonie, et les résultats ne furent pas au rendez-vous. Il faut dire que gérer une entreprise, en plus des aléas de la vie auquel il faut faire fasse souvent, ne donne pas toujours le choix de faire comme l’on voudrait. C’est aussi une des grandes inégalités de notre sport : au-delà de la capacité intellectuelle, sensitive, de chacun à gérer efficacement une colonie, nous sommes tributaires du temps et de l’espace de liberté psychique laissés disponibles par nos activités professionnelles. Ce n’est souvent pas facile de tout concilier, n’oublions pas que certains ne seront pas champions juste parce qu’ils n’en ont pas le temps matériel ou la ‘fraicheur’ psychique de pouvoir le devenir, du fait de leur travail. Il faut aussi le rappeler de temps en temps.

Le médaillé de bronze de notre édition 2016 a été préparé cette saison sur les fédéraux régionaux : Sens (190 km) ; Troyes (310 km) ; St Dizier (385 km) puis Lunéville (533 km). 15 jours avant Assen, il fut arrêté pour se préparer à cette étape.

Il a été joué au veuvage total. La femelle n’est pas montrée à l’enlogement, mais peuvent rester ensemble une à deux heures au retour (si les deux sont rentrés - sinon, c’est premier arrivé premier servi).

Management

Faute de temps, les choses sont simplifiées au maximum. Vous l’avez vu, les femelles ne sont pas montrées avant l’enlogement.

Les mâles sont lâchés une fois par jour, le midi, quand Philippe a le temps de rentrer. La volée n’est pas forcée. Les femelles sont, elles, lâchées uniquement 2 fois par semaine. Plus souvent ce n’est pas possible avec l’emploi du temps chargé de notre chef d’entreprise. Les pigeonneaux sont lâchés, eux, le soir, après le travail.

Produits

La saison commence par le vaccin obligatoire PMV, et également habituellement un vaccin paratyphus, pas fait cette année. S’en suit un traitement contre les vers en début de saison.

Les traitements trichomonose, il n’en donne plus depuis qu’il a adopté le système ‘Biovern’. Deux fois par semaine, il combine les produits BIolistab® et Aviflor® de ce fabricant Français (F-62 Arras). Tous les pigeons en bénéficient : reproducteurs, voyageurs et pigeonneaux.
10 jours avant Assen, les voyageurs ont reçu un traitement de 5-6 jours de ‘Broncho-sprint®’ (laboratoire Schroeder-Tollisan) contre les problèmes de voies respiratoires.

Nutrition

En début de saison, les voyageurs reçoivent du ‘Sport Light’ de chez Teurling, ensuite la gamme ‘Plus’ de Versele Laga est utilisée.

Au-delà de 350-400 km, du ‘Sport Plus’ compose la ration. Rien de plus côté préparation d’une course.

Au retour, le dépuratif est au menu pendant 2 jours, avant de reprendre le régime normal.

Les athlètes sont nourris une fois par jour, suite à la volée ; tout doit être mangé de la ration donnée, pas de surcharge pondérale ainsi.

Ambiance

Une chose que Philippe tenait à faire passer via cet article concernait les ambiances parfois délétères rencontrées dans notre hobby (à décharge, pas plus que dans la société en ce moment). C’est ajouté aux rapaces et aux pertes tant conséquentes qu’inexpliquées de pigeons, un élément important de la perte d’adhérents. Ce problème d’ambiance est préjudiciable à tous. Lui-même n’a bien failli ne pas participer à Assen pour cette raison.

Je rajouterais qu’il n’est pas facile de lutter contre ceci. Nous sommes dans un milieu de passion, et les esprits en sont d’autant plus échauffés. De façon générale, vous remarquerez que, a quelque partie que vous parliez, vous avez devant vous le plus vertueux. Tout n’est jamais blanc ou noir, la vérité est souvent dans +/- un juste milieu à quelques exceptions près. Gardons à l’esprit qu’il y a des choses plus graves qui nous pendent au nez ; il faut relativiser un peu dans la mesure du possible.

De l’autre coté, nous n’emmènerons pas avec nous les trophées et la gloriole, mais notre conscience, et les instants de bonheur que nous aurons su construire et partager lors de notre parcours, pas plus. L’impact sur nos proches, qui supportent déjà notre hobby prenant, est souvent catastrophique, ils supportent alors nos humeurs peu reluisantes...

Si nous voulons encore jouer un peu, il nous faut tenter de mettre un maximum d’eau dans notre vin, car nous ne sommes plus assez nombreux pour nous entre-étriper allègrement. Il faut aussi être pragmatique là-dessus, mieux vaut rentrer les couteaux au tiroir. Heureux ou pas ensemble, et sans pour autant coucher dans le même lit, nous devons cohabiter un maximum, il est bon de se rappeler que nous avons tous la même passion : le sport colombophile. Sans ‘les autres’, nous ne pouvons pas jouer, c’est tout, une fois seul, peu de choses deviennent possibles en colombophilie.

Avenir grand fond

Espérons que cette belle prestation sur Assen va remotiver notre ami Philippe pour les saisons à venir. On peut voir les pertes, les engueulades, les mauvais côtés, c’est vrai. On peut tourner son regard aussi vers les victoires, les arrivées à jamais gravées dans votre mémoire, les amitiés sincères qui se nouent au fil des rencontres, des saisons, et le principal, le plaisir de côtoyer nos pigeons, les tenir, les voir voler, se projeter dans les saisons à venir en rêvant de succès, de plaisir.

Gageons que notre ami pourra encore longtemps profiter du bénéfice de ce réel succès en grand fond pour renouer avec cette passion des longs cours qui nous fait tous vibrer. Avec des voiliers capables de se montrer d’aussi belle façon sur une épreuve très sélective, nul doute qu’il a dans ses installations de quoi lui fournir, dans les années à venir, beaucoup de plaisir sur nos étapes longues distances.

A bientôt, félicitations pour cette superbe prestation !

David Chassagne, Août 2016